Les reines noires de Meroe

Publié le par Dorian_G

Histoire de la Nubie : l'Empire de Méroé À partir de 270 a.n.è s'élabore à Méroé, un peu en aval de la Sixième Cataracte, une civilisation originale où se mèlent influences égyptienne, grecque, romaine et africaine : la civilisation méroïtique. On ne sait pas exactement quand cette cité succéda à Napata comme capitale de l'empire nubien.

Certains scientifiques ont pensé que le sac de Napata par le pharaon Psammétique II poussa les Koushites à déplacer leur capitale plus au sud. Cependant, si les souverains choisissent désormais de se faire inhumer dans la nécropole de Méroé, Napata reste le principal centre religieux de l'Empire. La population vit de culture et d'élevage, notamment de troupeaux de bovins. Les ressources minières ainsi que le commerce avec la Vallée du Nil, la Mer Rouge et l'Afrique Centrale, contribuent à la richesse du royaume. Durant des millénaires, les cultures nubiennes n'eurent pas d'écriture propre, utilisant les hiéroglyphes sur leurs monuments. Ce n'est qu'au IIe siècle a.n.è qu'apparaît un système d'écriture emprunté aux écritures hiéroglyphique et démotique, véhiculant la langue locale que la communauté scientifique internationale cherche toujours à comprendre.

 Le site de Méroé est très étendu. De nombreux sanctuaires ont été dégagés à l'extérieur de la ville et environ deux cent pyramides sont recensées dans les trois nécropoles. Toutes furent systématiquement pillées par les aventuriers attirés par le légendaire or de Méroé et ont été restaurées par l'organisation des Antiquités du Soudan. Le temple d'Amon conserve un plan traditionnel : pylône, cour, salle de la barque sacrée et Saint-des-saints. Par contre, les temples dédiés aux divinités indigènes sont différents : une ou deux chambres avec ou sans pylône. Le dieu guerrier à tête de lion Apédémak est le plus vénéré du panthéon méroïtique aux côtés de Sébiouméker dit "seigneur de Mousawwarat" considéré comme un dieu créateur. Le royaume de Koush eut peu de rapports avec l'Égypte perse. Il en entretint de plus nombreux avec la dynastie ptolémaïque attirée par le fer, le bétail et les produits d'Afrique noire. La domination romaine inquiéta davantage les Koushites.

 À la tête d'une armée, la reine (la "candace") Amanis Shaktete s'empare des points stratégiques de Basse Nubie et dévaste Philae, Syène et Éléphantine. Le préfet Pétronius envoyé par Rome la poursuit jusqu'à la Quatrième Cataracte, détruit Napata et le temple d'Amon au Djebel Barkal. Méroé échappe au désastre et restera une cité florissante mais le royaume de Koush ne tardera pas à connaître une progressive décadence. Les nombreux sites qui restent à fouiller, notamment la ville de Naga, nous permettront peut-être d'en savoir plus sur l'éclatement de l'empire méroïtique et sur l'héritage que lui doit l'Afrique. Les diverses influences se révèlent dans l'architecture.

Vue des pyramides de Méroé, en Nubie - 42.6 ko

Le kiosque de Naga est d'un plan égyptien. Par contre, les fenêtre "romanes" dérivent de l'architecture hellenistico-romaine. De plus, des motifs typiquement méroïtiques existent dans l'ornementation architecturale Située au Nord de la 6ème cataracte, Méroé devient capitale du royaume méroïtique. Une brillante civilisation, basée sur une agriculture prospère, un commerce important et un pouvoir solide, se développa entre le Vème siècle avant notre ère et le IVème siècle après J.C.

L'âge d'or de la cité se situe au Ier siècle avant J.C. : Méroé devient alors un grand centre de commerce, réputé pour ses fonderies de fer, minerai abondant dans les collines des steppes environnantes. Vaste métropole, Méroé est au coeur d'échanges entre plusieurs civilisations, nous permettant aujourd'hui de définir la culture méroïtique comme étant un mélange d'influences ptolémaïque, romaine, méditerranéenne et asiatique. Il est plausible que cette cité fut déjà capitale au VIème siècle av. n.è., les souverains ayant quitté Napata, première capitale du royaume koushite. Il semblerait que les rois napatéens, de plus en plus influencés par le clergé du Gebel Barkal, aient voulu rompre avec cette emprise et renouer avec leur théologie : les souverains kouhsites étaient alors intrônisés par l'Amon de Napata et non plus par celui qu'ils appelaient leur "Excellent Père" qui élisait le pharaon par oracle au sein de la Montagne Pure (système qui nous est connu grâce à la Stèle de l'Election d'Aspelta). La nécropole de Nouri est donc abandonnée sous le règne d'Arkamani (295-275 av. J.C.).

LE SITE ARCHEOLOGIQUE Situé à proximité du village de Bajrawiya, il révèle trois nécropoles. la nécropole Nord-ouest avec environ 500 tombes et 100 pyramides correspond au cimetière des nobles et des personnages secondaires de la maison régnante. les nécropoles royales (à l'est) dans lesquelles ont été découverts les bijoux de la reine Amanishakheto. la nécropole Nord et Sud, destinée aux rois et reines compte environ une quarantaine de pyramides. (photo d'un tombeau de la nécropole Nord) 184 pyramides en grès et à gradin, dont les hauteurs culminent entre 10 et 30 m de haut ont été recensées. Les plus anciennes rappellent le style de Nouri. Vers la cinquième génération, les angles des édifices deviennent plus lisses, les chapelles s'ornent de scènes théologiques. La dernière évolution présente un retour aux pyramides à degrés, construites sans bases solides, ce qui entraina leur tassement, voire leur disparition. Elles sont généralement composées d’un pylône, d’une chapelle funéraire décorée de relief et adossée à l’est de la pyramide, (les deux rappelant le temple égyptien funéraire traditionnel), de la pyramide avec une niche placée au sommet qui abritait la statue du défunt et du caveau souterrain qui accueillait le corps. Durant la période méroïtique, le pharaon et la famille royale étaient au centre du monde funéraire.

Depuis 1976, ces pyramides sont consolidées ou restaurées par l'architecte et nubiologue F. W. HINKEL. Ses travaux ont permis d'identifier une méthode de construction spécifique. De nombreux poteaux de cèdre retrouvés au centre des monuments laisse suggérer la thèse suivante : les bâtisseurs méroïtiques élevaient la superstructure grâce à un système de levage, assise par assise. Cette méthode, ne permettant pas l'érection d'un pyramidion explique la plate-forme traditionnelle des pyramides soudanaises. Mais on peut également y admirer : les vestiges d'un atelier de forge du IVème siècle mis à jour par la S.F.A.S. un sanctuaire d'Apédémak une temple d'Osiris Un temple d'Amon de nombreux sanctuaires les ruines de la cité, déjà identifiées par James Bruce en 1772 et dégagées en 1910 Les fouilles archéologiques ont livré récemment des témoignages méroïtiques telles des parures (comme cette bague), des statues funéraires dites "statues-bâ" ou encore une statue royale en bronze, nous apportant la preuve de la maîtrise de l'art à cette époque. Méroé s'effondre vers 350 après J.C., avec vraisemblablement le déclin de sa richesse et l'arrivée des Nobades. Débute alors la période post-méroïtique. Mais le mystère entourant cette civilisation marginale et fascinante, qui inspira un grand nombre d'auteurs (Hérodote, Strabon ou Diodore de Sicile) reste encore bien enfoui sous les sables de cette Nubie soudanaise.....

Publié dans Histoire

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article